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Le conflit chasseurs – anti chasse analysé par un sociologue.

Pourquoi la chasse est-elle autant critiquée par les défenseurs de la nature ? Le sociologue Jean Viard nous propose son éclairage sur la question.

« La chasse, c’est une victoire de la Révolution française, parce qu’avant, elle était réservée aux aristocrates »

Sur FranceInfo Jean Viard, directeur de recherche au CNRS au CEVIPOF (Centre de recherches politiques de Sciences Po) et diplômé en économie et docteur en sociologie témoigne et livre son regard sur le sujet de la chasse qui anime aujourd’hui les débats, depuis sa reprise début septembre. Son entretien complet est à retrouver ici :

https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/question-de-societe/question-de-societe-jean-viard-la-chasse-cest-une-victoire-de-la-revolution-francaise-parce-qu-avant-elle-etait-reservee-aux-aristocrates_4096371.html

L’ouverture de la chasse était il y a trois semaines, les chasseurs ont donc pu, ressortir les fusils, les chiens et se retrouver dans les chaumes et forêts afin de partager leur passion. Cependant, comme chaque année, les zozos de la cause animale ont tenté de nuire à cette activité, malgré le fait qu’elle soit parfaitement légale.

A la question « Qu’est-ce qui se joue dans ce débat sur la chasse ? Quelles valeurs s’affrontent ? « , Jean Viard à répondu  » La chasse est souvent familiale, c’est-à-dire que le fils va chasser avec son père, parce que c’est très masculin la chasse, ou alors, c’est des jeunes hommes, et il faut passer le permis de chasse. C’est un peu au moment du permis de conduire, et donc il y a un côté : je m’achète un fusil… Dans les sociétés rurales, c’est un élément de lien social… ». Il poursuit « Il y a 23 millions de Français qui déclarent avoir beaucoup baissé leur consommation de viande, et en même temps, on n’a jamais eu autant d’animaux domestiques. L’animal est entré dans la maison. J’ai tendance à dire l’animal des champs est un peu remplacé par l’animal du canapé ». Ce lien avec les animaux, s’est transformé chez certains zozos en anthropomorphisme. C’est-à-dire, qu’ils considère l’animal au même niveau que l’homme, voir en dessus ! Au delà de ça, ce débat remet en question toute la ruralité. Il explique « Ça va avec tous les débats sur l’agriculture. Et au fond, quel est le rapport que l’homme peut avoir avec la nature ? Il y a tous ces éléments là, mais ce qui est frappant, c’est qu’avant, il y avait des chasseurs et des non-chasseurs ». En effet, auparavant la société tolérait et acceptait les autres dans leur différence, aujourd’hui, dite « plus évoluée » elle incite à l’intolérance. Si nous pensons différemment, attention au retour de bâton. Il termine en expliquant « Maintenant, il y a pro-chasse ou anti-chasse, c’est-à-dire si vous n’êtes pas pour la chasse, vous voulez l’interdire aux autres alors que la seule étude que j’ai trouvée montrait que 60% des Français sont contre l’interdiction de la chasse. C’est une enquête du Point, parce que si vous voulez, c’est vu comme populaire. C’est vu comme une tradition. Et on n’a pas envie d’effacer les traditions. On est dans une époque, où on a envie d’esprit des lieux, on a envie de local, etc. Donc il y a ça d’un côté. Et puis de l’autre côté. Il y a cette idée au fond de l’animal qui est en train de changer lentement. Il y a des groupes de pression très puissants. Il y a un affrontement entre les deux, il faut être prudent. Tout ça peut devenir mauvais ». En effet cela peut devenir mauvais, si ce n’est pas déjà le cas. Les chasseurs tolèrent et rongent leur frein, mais jusqu’à quand ? A force d’attaques les émotions pourraient passer par dessus la raison.

La ruralité attaquée

Jean Viard souligne durant l’interview le profil des ces anti-chasse. « Soyons honnêtes, je pense que les anti-chasse sont plutôt des urbains, même si n’oublions pas que la plupart des ruraux travaillent en ville, etc. Faut pas avoir l’image de la campagne du Moyen-Âge, mais quand même, il y a un peu deux sociétés. Il y a une pensée écologique qui monte et qui est très intéressante, mais qui est quand même plutôt portée par le monde urbain, et donc pour qui la chasse est quelque chose d’absolument inconnu qui n’existe pas. Ils n’ont jamais vu un chasseur, ils n’ont jamais vu une battue. Et d’ailleurs, souvent, ils attaquent, par exemple la chasse à courre et la chasse aristocratique. Les riches, c’est toujours plus facile de critiquer les riches que les populaires ». Même si nous le savions la chasse est aujourd’hui représentative de la mixité sociale qui nous compose. Les chasseurs se regroupent autour d’une passion commune, dans un univers commun, avec des codes bien à eux.  Il y a certes des dérives mais cela n’est aucunement représentatif du monde cynégétique actuel.

Tolérance, partage, l’Homme est un animal parmi les autres

Le chasseur connaît sa place. Son lien avec la nature, la faune, la flore lui offre une perspective de vie que lui seul peut comprendre. Les liens sociaux créés à partir de la chasse sont uniques et les connaissances écologiques transmises par le biais de cette activités ne sont plus à prouver.

Jean Viard accepte la chasse et témoigne du fait que l’homme fait partie intégrante des espèces présentes sur terre. Il termine son interview en expliquant qu’il préfère être un sanglier, vivant à l’état sauvage, nourrit de fruits bio (gland etc..), plutôt qu’être un cochon rose. Voici la fin de son interview poignante, avec un regard extérieur et réfléchi sur l’acceptation et la tolérance. « Moi, je vois chez moi, j’habite à la campagne et les gens qui vont à la chasse au sanglier sont des gens extrêmement modestes, c’est leur grande activité du samedi. Donc tout ça, c’est pas le même monde, et on est au moment où ces deux mondes vont devoir se rencontrer et je pense que cette pandémie, elle nous a montré au fond que la nature – ce virus, au fond, c’est la nature – l’homme n’est pas maître et possesseur de la nature. Il doit négocier, il doit trouver une forme de tolérance. Il doit changer sa relation. C’est vers ça qu’on va, si vous voulez. Est ce qu’on va y arriver ou pas ?

Mais je vais vous dire une chose, c’est peut être humoristique, mais si je me réincarne un jour en cochon, je préférerais être un cochon sanglier des montagnes qu’un cochon d’élevage. Donc, je peux comprendre que les gens qui ne veulent pas manger de la viande par philosophie soient choqués par la chasse. Je le comprends bien. Après, si vous voulez, c’est vrai que je pense que c’est un rapport, nous sommes un animal parmi les animaux, nous sommes une espèce parmi les autres, et chacun doit respecter l’autre. »

 

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